RHONE
Photo prise de la colline saint Gérald, à Givors, avant les grands travaux sur le Rhône
Comme vous le savez, amis lecteurs, je suis issue de familles iséroises, ardéchoises et d'un milieu paysan solidement implanté dans la vallée du Rhône, des régions voisines mais très différentes. Ma grand-mère née dans cette petite commune de "Loire sur Rhône" que j'appelle Luiri dans mes romans (son nom d'autrefois) me narrait des épisodes de sajeunesse, que j'exploite plus ou moins consciemment dans mes écrits, en souvenir d'elle et parce que j'en suis totalement imbibée.
Les ponts élégants de Marc Seguin, ingénieur ardéchois, sont toujours là à faire le grand écart au-dessus du fleuve. Mais un peu partout sur le cours du Rhône des ouvrages plus massifs se sont implantés, par exemple le "pont neuf" qui relie Saint Romain en Gal à Vienne. La "passerelle " est désormais réservée aux piétons.
J'ai adoré la traverser lorsque je fréquentais le lycée Saint-Charles, à Vienne. L'autocar me déposait sur la rive droite du fleuve et il me fallait traverser pour retrouver la rive gauche. Je m'en souviens comme si c'était hier : je m'arrêtais au milieu de la passerelle et j'imaginais les impressionnantes masses d'eau qui filaient sous mes pieds. Accoudée à la balustrade je contemplais les flots rapides pailletés par les reflets du soleil. Des mouettes par centaines tournoyaient en piaillant. Sur la berge le vent retroussait les feuillages des peupliers. Une péniche descendait vers le midi, elle appartenait à la dernière génération des bateaux rhodaniens, les automoteurs, dont la plupart étaient des Citerna, transportant des hydrocarbures.
Et le fleuve aux eaux vertes m'entraînait en imagination vers la mer, et quand je le dessinais en cours de géographie, je trouvais qu'il aviat la forme d'un vergne, l'un de ces arbres amoureux de ses rives : deux fortes racines, un tronc puissant et fourchu, des branches ramifiées.
C'est en partie cette ambiance que j'ai voulu restituer dans mon dernier livre, une "vie en chantier".